rester témoins impassibles des malheurs qui menacent la patrie et ceux que j’aime. Aujourd’hui, ma « frégate » a fait ses preuves. Elle peut nous aider à apporter le réconfort de notre présence et des nouvelles du dehors au colonel Sauzède, quand nous saurons dans quelle place il s’est réfugié. De la sorte, tu pourras être à ton poste de soldat et moi à ma place, près de ma fiancée.
— Mais, objecta Hervé, tu ne comptes pas nous porter d’une envolée d’ici au Tonkin.
— Non, certes ! C’est irréalisable. Mais j’ai conçu les grandes lignes d’un plan que nous allons étudier ensemble. Voici : tout d’abord nous pouvons descendre la côte, sous pavillon chinois, par un caboteur et ainsi gagner Canton. Là, une route naturelle s’ouvre à nous : le Si-Kiang. Nous le remonterons aussi loin que possible en sampans, que Laï-Tou va partir m’acheter à Canton et munir de moteur et d’hélice. J’espère parvenir ainsi, par le You-Kiang, jusqu’aux environs de Long-Tchéou. Cette ville touche à la frontière tonkinoise.
— La frontière septentrionale, oui ! observa Hervé. Mais si le colonel Sauzède est au centre, à Tuyen-Quang, par exemple, nous aurons toute une région occupée par l’ennemi entre lui et nous. »
Roland secoua le front.
« II ne peut être dans cette direction, voici pourquoi. Les troupes françaises ont évacué le delta, nous annonce la dépêche ; Hanoï doit être à cette heure sous le feu des