Le jeune aviateur passa une inspection suprême de son appareil, vérifia les points d’attache et de serrage, le fonctionnement des leviers de manœuvre ; puis, rassuré, il ordonna l’évacuation de la piste devant lui.
Un silence se fit dans la foule quand Salbris apparut assis sur son siège, la main sur le volant. Soudain l’aéroplane s’ébranla, courut sur la piste, dont il se détacha bientôt. D’abord il fila à quelques mètres de terre, puis, sous la commande du gouvernail, piqua vers le ciel.
Tous les assistants étaient debout, tendant le cou comme pour accompagner dans son ascension le monoplan qui s’élevait, sans effort apparent, avec l’aisance d’un épervier suspendu sur sa proie. Puis il s’inclina pour prendre son virage, redescendit à frôler l’herbe, au point que chacun eut l’impression d’une chute ; mais aussitôt il se relevait et reprenait sa course circulaire. Salbris, ivre d’une volupté inconnue, dans laquelle l’orgueil du dompteur avait moins de part que la satisfaction du cavalier qui sent obéir à sa main un animal docile, jouait de sa création, dont il se sentait sûr. Le vent cependant avait fraîchi, et des remous l’assaillaient au passage ; n’importe ! l’oiseau mécanique passait au travers, les coupant de ses ailes tour à tour infléchies. Assuré de son succès, Roland le voulut plus grand encore. Brusquement il coupa l’allumage. Grâce à sa stabilité, en un long vol plané, l’appareil se rapprocha du sol. Roland descendit ainsi devant les tribunes, et seulement à hauteur des premiers