Jeanne, — sa voix frémit en prononçant ce nom, — de mettre à votre doigt la bague de fiançailles que ma mère portait au sien ? »
Il avait tiré d’un écrin un saphir enchâssé entre deux perles d’un délicat orient rosé.
La jeune fille tendit une main tremblante ; une rosée scintillait dans ses prunelles, et tout son visage rayonnait d’une joie auréolée de pudeur.
« Vous êtes ma fiancée ! prononça Roland d’une voix profonde, et je vous consacre ma vie. »
Trop troublée pour répondre, la jeune fille masqua son émoi en s’abritant dans les bras de son père.
« Allons ! dit en souriant mélancoliquement le colonel, voici un baiser qui ne m’était pas destiné. Va, nous sommes à l’abri des indiscrets, et je te permets de l’échanger avec celui qui me prend la première place dans ton cœur.
— Oh ! papa ! protesta Jeanne, ne soyez pas jaloux : loin d’y perdre, vous gagnez deux enfants à vous aimer ! »
Le père ne répondit pas ; mais le pli douloureux de ses lèvres dénonçait sa résignation au décret de la Providence, qui veut que, pour la femme, tous soient primés par l’homme auquel elle a donné sa foi.
Dès lors, pour les deux fiancés le voyage continua dans un enchantement. Après l’escale de Singapour, néanmoins, Roland s’assombrit. L’imminence de la séparation glissait un nuage sur l’ensoleillement dont les accordailles