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même où il venait de reconquérir son enfant, lui était pénible, intolérable même. Mais il se défendit d’obéir à cette révolte égoïste. Il descendit en lui-même, s’absorba dans une méditation profonde qui pesa lourdement sur l’attente de Salbris.

Enfin le colonel parla :

« Mon ami, je ne me crois pas en droit de vous répondre par un refus qui serait immérité, toutefois Jeanne est bien jeune encore, et je n’ai pas le courage de me séparer d’elle, quand, pour la première fois, je vais goûter les joies de l’intimité familiale. Je soumets donc la réalisation de votre désir à une attente de deux ans. Cette exigence de ma part sera l’épreuve de la profondeur de votre sentiment… Oh ! corrigea-t-il sur un geste protestateur de Salbris, je sais que vous n’êtes pas homme à vous engager sans être sûr de vous, et, en réalité, je dois avouer que ce délai imposé est la part de bonheur paternel que je me réserve. N’y ai-je pas droit, mon ami ?… Votre intimité aura toute la vie devant elle ; deux années pour moi, est-ce trop demander ?… »

Roland se taisait, sans argument pour retenir près de lui un bonheur qu’il avait cru proche et qui reculait dans les lointains de l’avenir.

Le colonel reprit :

« Ma foi en vous est entière, et pour vous en donner la preuve, je vous autorise, dès ce jour, à nommer Jeanne votre fiancée.