— Vieux farceur ! répliqua le Parigot, n’es-tu pas déjà en faute en étant avec nous ? Tu me fais rire avec tes scrupules. D’ailleurs, pour les calmer, je t’ai ménagé une surprise qui t’aidera à jouer ton rôle et qui sera ta récompense. »
Il exhiba, aux yeux du Chinois ébloui, le pot d’opium et deux incomparables pipes, l’une d’écaille brune, l’autre de bambou noir au bouquin de jade.
Laï-Tou tendit des mains avides.
« Donne ! supplia-t-il.
— Une fois que tu te seras camouflé dans les belles frusques, dit le Parigot, pas avant. Ce sont des pipes de mandarin que seul un mandarin doit fumer ; ici l’habit suffira pour faire le moine, et le divin opium t’inspirera, ô mon père, la sagesse dans tes actes et dans tes paroles. »
Une heure plus tard, portant Laï-Tou, couché dans le palanquin, son plus jeune fils marchant près de lui en serviteur attentif, la caravane descendait vers Cao-Bang par les chemins frayés. Les poignets liés d’un nœud prêt à céder à la première traction, Troussequin marchait entouré par le reste de l’escorte en armes.
Étendu sur les nattes, calé contre les petits coussins de cuir, voluptueusement Laï-Tou fumait.
Il fumait, et chaque pipe de la drogue suave, dont il avait été si longtemps sevré, exaltait son cerveau, le dilatait de bien-être, l’éclairait de lucidité. Nulle tâche ne lui semblait désormais irréalisable, tout danger lui deve-