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Que reste-t-il donc ? Tout le monde le voit, et l’apôtre nous l’apprend ; il faut que cet être corruptible et périssable soit revêtu d’incorruptibilité, afin que par la résurrection nos membres épars ou dissouts venant à se réunir, et un souffle de vie ranimant nos cadavres, chacun de nous soit récompensé ou puni selon le bien ou le mal qu’il aura fait par le moyen du corps.

XIX. C’est par ce raisonnement, et d’autres semblables, qu’on peut confondre ceux qui reconnaissent une Providence, et admettent nos principes, mais les oublient, je ne sais comment, dans la discussion. Ce que je viens de dire en peu de mots et comme en passant, on peut le développer plus au long. Pour ceux qui révoquent en doute jusqu’aux premiers principes, tout ce qu’on peut faire de mieux c’est d’adopter à leur égard la méthode suivante ; douter avec eux et leur demander : Faut-il croire que toute la vie de l’homme est tellement vouée au mépris, que personne ne s’en occupe ; qu’une noire vapeur, couvrant la surface de la terre, plonge dans l’oubli et le silence, et les hommes et leurs actions ; ou bien ne serait-il pas plus sûr de penser que le Créateur préside à son œuvre, qu’il voit tout, qu’il juge les pensées et les actions, même les plus secrètes. Car, si les actions de l’homme ne sont soumises à aucun jugement, l’homme n’a rien qui le distingue de la brute : que dis-je ? Il est plus malheureux que l’animal sans raison ; il dompte, il réprime les mouvements de son cœur ; il pratique la piété, la justice et toutes les autres vertus : alors la vie des animaux et des bêtes féroces serait bien préférable, la vertu deviendrait la plus grande des folies, les menaces d’un jugement, la chose la plus ridicule ; se livrer tout entier à la volupté serait le souverain bien, l’unique loi, le but commun ; il n’y aurait plus de maxime raisonnable que celle des débauchés et des voluptueux : « Mangeons et buvons, car nous mourrons demain. » Que risquerons-nous ? La fin d’une telle vie n’est pas seulement la volupté, comme se l’imaginent quelques-uns, mais la mort, suivie de l’extinction de tout sentiment. Au contraire, si le Créateur prend quelque intérêt à son œuvre, et s’il met une différence entre l’innocent et le coupable, quand s’établit la