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mal s’élevait celle d’un dieu, appelé Hercule ou Chronus ; cet Hercule engendra un œuf d’une grosseur prodigieuse ; trop fortement pressé par son père, lorsqu’il était plein, cet œuf se rompit en deux parts : la partie supérieure prit la forme du ciel, et celle d’en bas prit la forme de la terre. Ainsi la déesse appelée la Terre parut avec un corps ; le ciel s’unit à elle et engendra trois filles, Clotho, Lachésis et Atropos ; il engendra aussi des hommes qui avaient cent mains, tels que Cottys, Gygès, Briarée, et les cyclopes Bronté, Stérope, et Argus, qu’il précipita ensuite chargés de fers dans le Tartare, lorsqu’il eut appris que ces mêmes enfants voulaient le détrôner. C’est pourquoi, irritée de la cruauté de son époux, la Terre enfanta les Titans ; de là ces paroles du poëte :

« Alors l’auguste Terre mit au jour des enfants tout divins, qu’on appelle Titans, parce qu’ils se vengèrent contre le Ciel resplendissant d’étoiles. »

XIX. Telle fut l’origine de ces prétendus dieux, et celle de toutes les autres créatures. Mais que faut-il en conclure ? C’est que tous ces êtres dont on fait des dieux ont eu un commencement ; dès lors ils ne sont pas des dieux ; s’ils sont créés, comme le reconnaissent leurs propres adorateurs, ils ont cessé d’être ; car tout ce qui est créé est sujet à la corruption, l’être incréé est le seul éternel. Et ce principe ne m’est point particulier, il est admis aussi par vos philosophes : « Il faut distinguer, disait Platon, entre l’être incréé et éternel, et celui qui étant créé n’a point une existence permanente. » Ce philosophe, parlant en cet endroit des choses qui sont perçues par l’esprit et de celles qui le sont par les sens, enseigne que ce qui est, et ne peut être compris que par l’esprit, n’a pas été créé ; tandis qu’au contraire, les choses sensibles, et qui ne sont point par elles-mêmes, ont été créées, puisqu’elles commencent et finissent. C’est par la même raison que les stoïciens prétendent que tout doit être un jour la proie des flammes, pour exister de nouveau ; que le monde doit reprendre un nouvel être. Or, si ces philosophes pensent que le monde, malgré les deux causes qu’ils assignent à son existence, dont l’une est active et souve-