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Enfin, quelques Juifs d’une grande naissance étaient admis à la cour des empereurs. Mais, comme il arrive toujours, leur zèle pour le culte et les mœurs de la patrie s’affaiblit à proportion de la richesse et du crédit qui les mêlait avec les vainqueurs.

Dans la Judée, devenue province romaine, et dans les autres provinces de Syrie et d’Égypte habitées par les Juifs, le caractère national se conservait mieux, et se montrait avec plus davantage.

Partout, dans le monde, les Juifs portaient les cérémonies et les pratiques de leur loi ; mais, en Judée, près du temple, ils retrouvaient l’orgueil de leur patrie, et les promesses immortelles de leur Dieu. Le souvenir des grands combats des Machabées contre les rois grecs d’Assyrie n’était pas encore éteint ; même, depuis la conquête romaine, ils avaient eu des rois de leur nation. Leurs priviléges étaient ménagés ; ils avaient leurs sanhédrins, leurs tribunaux, et Rome ne leur interdisait que le droit de guerre civile entr’eux. Les anciennes querelles de Jérusalem et de Samarie qui, sous les fils d’Hérode, étaient devenues plus d’une fois sanglantes, se réduisaient maintenant à des controverses. Dans l’oisiveté de la paix, les sectes florissaient, animées par le commerce des Orientaux et des Grecs, dont elles empruntaient diverses doctrines, mais en les rapportant à la loi mosaïque, si fortement empreinte sur toute la vie du peuple juif.

Ainsi, tandis que les philosophies grecques existaient, pour ainsi dire, hors du polythéisme, et devenaient des espèces de religions morales opposées à la religion purement mythologique de l’état, les sectes juives, au contraire, tiraient leur source de l’ancien culte du pays, et y rentraient de toutes parts. Pharisiens, saducéens, esséniens, tous croyaient à la loi mosaïque, qu’ils commentaient en sens divers : sans doute les thérapeutes, cette colonie d’esséniens solitaires et enthousiastes, avaient quelque chose de l’austérité des premiers disciples de Pythagore ; sans doute les saducéens, qui bornaient l’existence de l’âme à la durée de la vie, et mettaient le bonheur dans les