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de l’Académie, et le doute méthodique de l’école d’Aristote, ne voyait dans le polythéisme que des fictions et des symboles.

Cette influence de l’esprit philosophique décréditait dans toute la Grèce les oracles autrefois si célèbres, et dotés de si riches présents. La chute des diverses républiques de la Grèce avait également fait tomber beaucoup de fêtes religieuses qui, jadis, entretenaient la superstition par le patriotisme. Les savants du pays étudiaient encore ces souvenirs dans les anciens auteurs ; ils en parlaient dans leurs histoires ; les sophistes y faisaient allusion dans leurs discours ; mais tout cela n’était plus vivant dans les mœurs publiques. Les mystères d’Éleusis conservaient seuls encore leur auguste solennité ; mais, suivant toute apparence, les leçons qu’on y donnait aux initiés étaient plus contraires que favorables au maintien du polythéisme.

Une foule d’autres superstitions touchantes ou gracieuses étaient conservées dans les divers cantons de la Grèce. Plutarque, qui, si l’on peut parler ainsi, fut le dernier des philosophes croyants, comme Lucien fut le plus ingénieux des philosophes incrédules ; Plutarque, ramené par son admiration pour les plus grands hommes de la Grèce vers le culte et les mœurs antiques, nous raconte qu’ayant eu quelques démêlés avec les parents de sa femme, pour en prévenir les suites, il alla sur le mont Hélicon faire un sacrifice à l’Amour. Dans sa vieillesse, il était encore prêtre d’Apollon, et il menait les danses autour de l’autel du dieu. Cela ne l’empêchait pas de raisonner sur le culte d’Isis et d’Osiris avec la liberté d’un esprit sceptique ; il peignait également sous de vives couleurs les misères et l’abrutissement de la superstition ; mais cette même candeur qu’il a laissée dans ses écrits le laissait païen de bonne foi, et lui faisait adorer paisiblement les anciens dieux de la patrie.

La Grèce, à cette époque, ne doit pas être cherchée seulement dans elle-même. Ses anciennes conquêtes, ses arts, son génie, avaient colonisé une partie de l’Orient. Sa langue était dès longtemps répandue dans l’Asie-Mineure et l’Égypte ; des