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si fréquents aujourd’hui, que l’on dirait que c’est une nouvelle mode qui s’établit parmi nous ; dans cet égoïsme insociable, qui sépare l’homme de l’homme, dessèche dans les âmes tous les sentiments généreux et dissout jusqu’aux liens des familles ; dans cet esprit de cupidité, qui considère la bonne foi comme une duperie et qui ne s’applique qu’à combiner l’astuce et la fraude pour s’enrichir aux dépens, soit de l’état, soit des particuliers ; dans ces jalousies et ces haines effrénées qui ne rêvent que destructions et ruines pour se satisfaire ; enfin, dans ce matérialisme politique qui ne sait opposer que la force physique aux progrès d’une contagion toute morale ?

Ainsi se trouvent démontrées les deux propositions que nous avons avancées au commencement de ce discours : la première, que depuis près d’un siècle les esprits sont généralement plus développés qu’ils ne l’étaient auparavant ; la seconde, qu’ils se sont corrompus en se développant et à proportion qu’ils se sont développés.

Leur développement se prouve par la facilité qu’ils ont d’appercevoir et de déduire toutes les conséquences, jusqu’à la dernière, d’un principe quelconque. Il n’en était pas ainsi dans les siècles passés. Nous avons fait voir que les hérésies n’avaient pas cette étendue de raisonnement, et qu’elles ont été, toutes, inconséquentes plus ou moins. Le premier hérésiarque qui a rejeté l’autorité de l’Église catholique en un point de foi aurait dû, s’il avait raisonné conséquemment, la rejeter dans tous les points, cette autorité étant la même pour enseigner le point rejeté et les points admis. C’est pourtant ce que n’ont fait ni les sabelliens, ni les ariens, ni les novatiens, ni les pélagiens, ni les donatistes, ni les macédoniens, ni les nestoriens, ni les eutychiens, ni les monothélites, ni les Grecs schismatiques.

Les protestants sont les premiers qui aient proclamé nettement qu’il ne fallait s’en rapporter à aucune autorité dans la décision des questions de foi, et que la raison seule en était le juge compétent. Avec ce principe, ils ont retranché de la religion ce qu’ils ont voulu, les uns plus, les autres moins, mais