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LA FEMME

poche. En sortant de chez Germeuil, elle fut s’enfermer chez elle, afin de relire la romance ; elle pensa bien qu’elle étoit faite pour madame de Nangis ; ce qui lui fit connoître en même temps, que ces deux amans étoient à-peu-près d’accord !… Natalie plaignit madame de Nangis. Infortunée ! dit-elle, égarée par son cœur, elle va perdre son repos et sa réputation ; mais quelle séduction l’environne ! il est si doux d’être aimée ainsi, et par l’homme le plus aimable qui existe !… Après ces réflexions, Natalie se mit à sa harpe, et elle chanta la romance jusqu’à ce qu’elle sût par cœur l’air, l’accompagnement et les paroles. Les personnes vives et profondément sensibles ne peuvent s’abuser long-temps sur ce qu’elles éprouvent ; leur imagination les mène trop vîte et trop loin, pour qu’elles puissent conserver des sentimens indécis et concentrés. Natalie ne se fit point illusion sur les siens, elle connut qu’elle aimoit Germeuil, et elle ne s’en affligea point. Ce sentiment, dit-elle, dénué de toute espérance, ne de-