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LE BONHOMME.

mon cœur, puisque je vois, d’aprés votre récit, que par le seul ascendant de cette incomparable bonté, vous avez subjugué la femme artificieuse qui ne vous attiroit que pour vous tromper ; et je ne doute point que le désir de parler à mon père, ne lui ait été inspiré par un motif honnête pour vous. Peut-être que, renonçant au projet de vous séduire, et sachant vos liaisons avec moi, elle veut vous justifier d’avoir paru en public avec elle. Mais, poursuivit Isaure, je ne veux plus vous rien cacher ; il faut que vous connoissiez des foiblesses dont je suis guérie sans détour ; il faut que vous sachiez que cette femme m’a donné de l’inquiétude, et qu’avant cette aventure la jeune Marthe m’a causé la plus violente jalousie. Alors, Isaure conta naïvement tout ce qu’elle avoit éprouvé ; on conte bien longuement quand on parle de soi à ce qu’on aime : l’air attentif et touché de celui qui écoute, prouve si bien qu’on ne dit rien de trop ! Isaure n’avoit pas encore fini son récit, lorsque la cloche du dîner l’avertit qu’on alloit se mettre