Page:Genlis - Nouveaux contes moraux et nouvelles historiques, tome 3, 1802.pdf/366

Cette page a été validée par deux contributeurs.
362
LE BONHOMME.

ment et froidement ; il fut un peu déconcerté…

Les intrigans peuvent, en beaucoup d’occasions, éblouir et jouer les gens droits et sensibles ; mais ils ne connoissent du cœur humain que ses petitesses ; ils comptent trop sur la vanité, ou, pour mieux dire, ils ne comptent que sur elle, et souvent ils se trompent. Isaure avoit eu un moment d’enivrement qui s’étoit dissipé sans retour. Rien n’éclaire comme un sentiment vrai, rien ne perfectionne un caractère comme l’amour, quand c’est l’estime et la vertu qui l’ont fait naître. Isaure ne méprisoit pas le chevalier, mais depuis qu’elle aimoit M. de Férioles, elle ne l’admiroit plus. Comment auroit-elle admiré celui qui ressembloit si peu à son amant ! Le modèle de la perfection est l’objet qu’on aime : tout ce qui s’écarte de cette ressemblance cesse de plaire, tout ce qui s’y montre opposé devient antipathique ; Isaure, enfin, sans aucun raisonnement, commençoit à bien juger le chevalier, en le comparant à son amant. Le préambule du chevalier lui déplut ;