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LE BONHOMME.

monsieur, et c’est aujourd’hui le jour de sa fête. — Elle s’appelle Marthe ? — Oui, monsieur, la fille de Jarson le fermier. Tous les matins, avec son âne, elle passe par ici pour aller vendre, au village, de la crême et des herbes… elle chante de loin, je l’entends, et… — Et toutes vos roses sont cueillies ? — On n’a pas seulement laissé un bouton, et je n’ai vu cela que tout-à-l’heure :… hier, il y en avoit six ! et du moins, s’il en restoit une, je serois content ; mais le jour de sa fête, n’avoir pas une fleur à lui donner !… En prononçant ces paroles, le jeune garçon se remit à sangloter. J’étois placé de manière que, caché par la palissade qui nous séparoit, il ne voyoit que mon visage, et n’avoit pas apperçu la belle branche de roses mousseuses que je tenois. Allons, dis-je en moi-même, il faut faire un heureux ; Isaure ne s’attend point à recevoir cette branche, et si elle étoit ici, elle m’ordonneroit d’en faire le sacrifice : ce sera toujours une offrande à l’Amour… Comme je faisois cette réflexion, le jeune homme tressaillit, en s’écriant : Ah ! bon