Page:Genlis - Nouveaux contes moraux et nouvelles historiques, tome 3, 1802.pdf/348

Cette page a été validée par deux contributeurs.
344
LE BONHOMME.

lui, qu’elle avoit, de bonne foi, regardé ce mariage comme nécessaire au bonheur de sa vie ; mais il falloit renoncer à ce projet, puisqu’Isaure déclaroit enfin, avec fermeté, son inclination pour M. de Férioles. Madame de Béville sentit qu’elle pouvoit tirer un grand parti des imprudences d’Isaure, pour lui donner des torts et pour motiver le nouveau dessein qu’elle méditoit. Elle se décida donc à se plaindre hautement d’Isaure et du baron, à se brouiller avec tous les deux, et à épouser le chevalier, si ce dernier, comme elle n’en doutoit pas, lui déclaroit ses vrais sentimens ; car elle ne craignoit plus de se donner un ridicule, la rupture n’étant causée que par la seule volonté d’Isaure. D’ailleurs, madame de Béville, autorisée à montrer du ressentiment contre sa nièce, n’étoit plus retenue par cette tendresse touchante qu’on lui supposoit pour elle, et qui seule, disoit-elle, eût suffi pour l’empêcher de se remarier ; enfin, son enthousiasme pour le chevalier étant à son comble, la disproportion d’âge et toutes les considérations qui l’avoient effrayée