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L’AMANT

rent de ma léthargie : sa jeunesse, sa beauté m’attendrirent. « Il est vrai, lui dis-je, j’avois un engagement pris dès mon enfance ; j’avois promis ma foi, mais je vous l’ai donnée, c’est à vous que j’appartiens. — Aimiez-vous celle que vous deviez épouser ? — Elle n’avoit que douze ans quand je la quittai. — Et moi, j’ai dix-sept ans ». Cette réponse, faite avec autant de sentiment que d’ingénuité, acheva de fixer mon sort ; je tombai aux genoux de ma femme, nos pleurs se confondirent, et mon cœur ratifia le serment que la seule compassion venoit de m’arracher. Je trouvai dans Bathilde (c’est le nom de ma femme), tout ce qui pouvoit enchaîner une ame telle que la mienne ; l’innocence et la pureté d’un ange, une douceur touchante, un cœur sensible et généreux, l’esprit le plus délicat et le plus juste. Enfin, le sort qui me ravissoit Léontine, ne pouvoit me dédommager qu’en me donnant Bathilde. Je l’instruisis de ma situation, je ne lui cachai point que n’ayant aucune fortune personnelle, j’attendois tout des bontés