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LA FEMME

qu’en s’élevant elle s’étoit éloignée de lui, car il étoit toujours resté à la même place, et elle avoit abandonné la sienne par un essor rapide. Son imagination ne la lui offroit plus sous les traits charmans qui font naître l’amour. On ne se représente point les graces fixées près d’un bureau, veillant et méditant dans le calme des nuits ; c’est une branche de roses qui doit parer la beauté, une couronne de laurier la vieillit. Oui, disoit Germeuil à Natalie, je jouis de vos succès ; mais ne vous reprochez-vous point de prodiguer à l’univers des talens dont l’amour s’enorgueillissoit davantage encore, lorsqu’il en jouissoit seul ? Quoi ! tout le monde à présent vous connoît comme moi ! N’est-ce pas une sorte d’infidélité dont votre amant auroit le droit de se plaindre ? Quoi ! ces sentimens si tendres, si délicats, dont l’expression faisoit mon bonheur dans vos lettres, je les retrouve dans vos ouvrages ! ces phrases touchantes, inspirées par l’amour, m’appartenoient ; vous me les reprenez pour les publier et pour en faire des fictions !…