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long-temps ; enfin, elle vit au Vaudreuil M. Damézague, plus jeune qu’elle de quinze ans ; très-prévenue contre lui, elle vouloit partir quand elle le vit arriver. Il sut vaincre toutes ses préventions, lui tourner la tête en huit jours, au bout desquels cette fière veuve l’épousa dans la chapelle du château. Ils étoient mariés depuis trois ans, quand nous les trouvâmes au Vaudreuil ; ils vivoient ensemble comme deux tourtereaux. Madame Damézague étoit fort belle ; son mari avoit une très-jolie figure, et il a toujours été le plus tendre et le meilleur des maris. Il avoit l’air le plus étourdi, le plus évaporé que j’aie jamais vu ; il ne songeoit qu’à se divertir, à faire des tours, des niches, à donner des fêtes, il avoit toujours un projet d’amusement ; et, après la journée la plus brillante, il demandoit le soir : Que ferons-nous demain matin ? Il falloit le lui dire pour son repos ; sans un plan de ce genre bien arrêté, il n’auroit pas dormi. J’ai fait sur le mariage singulier de madame Damézague, la nouvelle intitulée, Les Préventions d’une Femme, dont M. Radet a fait un très-joli vaudeville.

Au milieu de la joyeuse société de Vaudreuil,