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demanda si j’avois peur d’y entrer. J’assurai que non ; et, pour prouver ma bravoure, je dis qu’on n’avoit qu’à me suivre, et que j’entrerois la première et sans lumière. Je fis mettre derrière moi le valet de chambre, qui portoit deux bougies, et je m’avançai hardiment dans l’antichambre ouverte ; mais, à peine y eus-je mis le pied, que je fis un saut en arrière en poussant un cri perçant ; je venois de sentir bien distinctement une grande main froide et décharnée s’appliquer tout entière sur mon visage, en me repoussant avec force… Je tombai presque évanouie dans les bras de ma tante, qui fut très-effrayée de l’état convulsif où j’étois. Elle vit bien qu’il m’étoit arrivé quelque chose de très-singulier. Elle me questionna. Je répondis, en mots entrecoupés, qu’une main de squelette m’avoit repoussée. Le valet de chambre entra avec les lumières, et il donna sur-le-champ l’explication du prétendu prodige. C’étoit un oranger desséché, posé contre la porte, dont une branche sèche et roide, s’étendant devant la porte, s’étoit trouvée à la hauteur de mon visage, et m’avoit causé cette étrange frayeur. Cette branche faisoit véritablement, au tou-