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teur. Le drame est de l’invraisemblance la plus extravagante, mais il offre des détails touchans et des scènes d’un très-grand effet. J’allai à la première représentation, et j’avoue que j’y versai des torrens de larmes ; il est vrai que jamais pièce n’a été jouée comme celle-là. Caillot ; Laruette, sa femme ; Clairval ; Trial, faisant le niais ; la charmante mademoiselle Beaupré, jouant le rôle de la petite fille, étoient tous des acteurs parfaits, et qu’on n’a point remplacés ; les paroles des plus beaux airs étoient souvent ridicules comme celles-ci :


« Mourir n’est rien, c’est notre dernière heure. »


C’est notre dernière heure : voilà un beau motif de consolation ; c’est précisément parce que c’est notre dernière heure que mourir est quelque chose. Sédaine a fait des centaines de vers de cette force-là ; surtout lorsqu’il veut être moral, il est unique ; voici une de ses maximes dont on ne contestera sûrement pas la vérité :


« Les pères seroient trop heureux,
Si le ciel combloit tous leurs vœux. »


Mais la musique de Monsigny ne permet pas de faire la moindre attention à cette singulière