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chapitre xvi

Fontaine de la Roche, fait bien comprendre le mécanisme de cette organisation. L’auteur n’était connu que de trois personnes, des correspondants attitrés qui venaient chez lui séparément, à sept heures, à sept heures et demie et à huit heures. Ces trois personnes avaient affaire à des sous correspondants, cinq en tout, qui venaient chez elles à une demi-heure d’intervalle. Les sous correspondants recevaient de la même façon la visite des imprimeurs, au nombre de sept, et enfin les colporteurs, au nombre de neuf, se rendaient dans les mêmes conditions chez les imprimeurs. Chacune de ces personnes ne connaissait que le correspondant auquel elle avait affaire. Si dans la demi-heure indiquée on n’avait pas vu paraître la personne qu’on attendait, on se rendait en toute hâte dans une maison de refuge, et de là on donnait de ses nouvelles à qui de droit. De cette façon les coups de filet étaient absolument impossibles, et les arrestations isolées ne pouvaient pas avoir de conséquences graves. Il n’y avait évidemment ni bureaux de rédaction, ni bureaux de vente ni abonnements réguliers quoiqu’une estampe fort jolie représente en 1732 une sorte de bureau où se pressent des acheteurs et des lecteurs en habits de marquis. Avec nos habitudes modernes, nous ne pouvons rien comprendre à cette organisation qui finit par être une source de profits puisque les Nouvelles ecclésiastiques parurent quelquefois, notamment en 1731, 1735, 1742 et 1762, avec des frontispices gravés dont plusieurs sont de véritables œuvres d’art. Qui faisait les frais d’une publication si importante, et comment parvenait-on à la répandre à profusion à Paris et dans les provinces les plus éloignées ? On ne pénétrera sans doute jamais ce mystère ; mais c’est une nouvelle preuve que les jansénistes étaient légion