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chapitre xvi

ardemment le chapeau de cardinal et qui s’était vanté de mettre à la raison, dans l’espace de quatre mois, tous les jansénistes de son diocèse, le cardinal Fleury présenta au Parlement une nouvelle déclaration du roi qui exigeait la signature pure et simple du vieux formulaire d’Alexandre VII, et qui faisait de la Bulle Unigenitus une loi de l’Église et de l’État ; c’était le chancelier Daguesseau, pleinement réconcilié avec la Bulle, qui conduisait cette affaire. Le Parlement se serait contredit d’une façon grossière et ridicule, et même il se serait déshonoré aux yeux de toute la France s’il avait enregistré spontanément une semblable déclaration. Aussi les Chambres assemblées élevèrent-elles des difficultés qui annonçaient un refus catégorique, et le roi, renonçant pour un jour à la chasse, qui était alors sa grande passion[1], tint le lit de justice du 3 avril ; la Déclaration y fut enregistrée par ordre, contrairement au vote de la grande majorité du Parlement. Jamais l’invincible répulsion des magistrats pour la Bulle ne parut avec plus d’évidence, et ils n’en continuèrent pas moins à protéger les appelants persécutés, et même à considérer comme non avenue la loi que l’autorité royale avait promulguée malgré eux. Ils y étaient d’ailleurs autorisés par ce fait que Fleury et Daguesseau avaient promis, au nom du roi, qu’il ne serait jamais fait usage de la Déclaration du 24 mars, déclaration toute platonique, et que des ordres avaient été donnés pour qu’il en fût ainsi dans toutes les provinces. Il y a plus, le gouvernement ne tarda pas à désavouer cette déclaration ; et il supprima par un arrêt du Conseil la lettre dé plainte que lui adressèrent

  1. On lit dans une chanson du temps :

    Roi né pour la chasse du cerf…