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histoire du mouvement janséniste

qu’il acceptait la Bulle « avec un respect et une soumission très sincères » et qu’il condamnait Quesnel et les cent une propositions. Il ajoutait en deux lignes qu’il révoquait « de cœur et d’esprit » son Instruction pastorale de 1719 et ses autres écrits contraires à la Bulle. C’était une acceptation sans phrases ; pas une allusion à l’acceptation conditionnelle de 1720, pas de révocation de l’appel de 1718, pas un signe de repentir pour une si longue résistance ; on dirait un coup de désespoir, et cet étrange document donne singulièrement à réfléchir quand on songe que l’évêque de Senez, prisonnier à la Chaise-Dieu, avait en sa possession le désaveu autographe du cardinal de Noailles, postérieur de quatre mois à son acceptation, et signé par lui le 26 février 1729. Ce désaveu fut publié aussitôt avec force attestations de curés qui l’avaient lu, et c’est bien timidement qu’on l’accusa de faux. Le principal négociateur de cette rétractation d’un vieillard de soixante-dix-sept ans, ce fut le chancelier Daguesseau ; cela résulte clairement d’une lettre autographe du cardinal Fleury adressée au chancelier et qui commence par ces mots : « M. le garde des sceaux vient d’arriver, Monsieur, ovans et presque triomphant, il m’a porté Votre mandement bien signé et avec la plus grande joie du monde. Gloire en soit rendue à Dieu premièrement, à vous, et à madame la marquise de Grammont[1]. »

En se rétractant de la sorte, Noailles allait à l’encontre des sentiments bien connus de presque tout le clergé de son diocèse mais on ne récrimina pas, parce qu’on avait pitié d’un malheureux prélat que l’on

  1. Cette lettre autographe est conservée dans les collections d’Adrien Le Paige avec beaucoup d’autographes de Daguessea » et de plusieurs autres grands personnages.