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CHAPITRE XIV 273

grettaient que l’on prétendît finir par des voies de rigueur une des plus grandes affaires de l’Église. Enfin le 7 mai 1728 Noailles se joignit encore à Colbert et à quelques autres prélats pour signifier au procureur général du Parlement de Paris un acte d’opposition contre tout enregistrement de ce qui était relatif au concile d’Embrun. Les opposants dénonçaient en même temps le Bref de Benoît XIII qui avait autorisé le concile. Mais douze jours plus tard le cardinal de Noailles révoqua la procuration qu’il avait donnée, et ce fut le prélude de ses défaillances finales. Il était alors sous la domination de sa nièce, la marquise de Grammont, dominée elle-même par les Jésuites, et cette femme avait pour allié le chancelier Daguesseau en personne. Daguesseau était père d’une nombreuse famille, et sa compagne ne lui disait plus ce qu’elle lui avait dit jadis, en 1713, lors de l’arrivée de la Bulle, qu’il avait en horreur : « Allez, monsieur, agissez comme si vous n’aviez ni femme ni enfants ; j’aime infiniment mieux vous voir conduire à la Bastille avec honneur que de vous voir revenir ici déshonoré. » Il ne voulait pas compromettre l’avenir de ses fils ; il accepta finalement la Bulle sans aucune réserve, et il ne négligea rien pour la faire accepter de même. Daguesseau manœuvra si bien que le 11 octobre 1728 les Parisiens stupéfaits purent voir sur les murs une affiche en caractères minuscules[1] qui contenait un mandement très sec et très court, et au dessous, en latin seulement, le texte complet de la Bulle Unigenitus. Quelques jours plus tard le Mandement parut imprimé in 4° à la manière ordinaire ; l’archevêque annonçait

  1. Je l’ai sous les yeux, on dirait qu’elle a été imprimée de mainère à ne pouvoir pas être lue.