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histoire du mouvement janséniste

applaudissement merveilleux ». En France, le succès fut moins vif, car les magistrats intervinrent, et la planche fut saisie ; elle dut être corrigée deux fois avant de pouvoir continuer à se vendre[1]. Port-Royal eut le tort de s’en émouvoir outre mesure, et on regrette de voir M. de Saci, redevenu poète comme au temps où il rimait les racines grecques de Lancelot, publier un petit poème satirique intitulé Enluminures du fameux almanach des PP. Jésuites…. dont voici les premiers vers :

Enfin Molina plein de gloire
Triomphe avec sa bande noire.
Le libre arbitre audacieux
Domine la grâce des cieux ;
Et l’humble Augustin en déroute,
Crie en vain qu’au moins on l’écoute.
Les Jansénistes, éperdus,
Pêle-mêle sont confondus ;
Tout fuit, et jamais la nature
Ne vit telle déconfiture.

Les Enluminures, contemporaines du Virgile travesti de Scarron, obtinrent d’ailleurs un très réel succès, tandis que le Père Le Moine échoua piteusement quand il répondit par L’étrille du Pégase janséniste, une « platitude rimée dont le jargon n’avait rien que d’un palefrenier », si l’on en croit un jésuite de nos jours, historien très judicieux du Père Le Moine[2].

Port-Royal mieux inspiré ne répondit pas à un gros libelle publié à la même époque, avec l’approbation enthousiaste de Nicolas Cornet, par le sieur de Marandé, greffier de la Cour des aides et intitulé : Inconvénients d’État procédans du jansénisme, avec la réfutation du Mars français de M. Jansénius. Ce

  1. Hermant. tome II, p, 335.
  2. H. Chérot.