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LES PARISIENNES
études morales
extraites de l’esprit de madame de girardin[1]

le courage des parisiennes. — leurs gouts en littérature.
signes du temps — bravoure et poltronnerie.
causeries positives. — dévotion des parisiennes. — l’air de paris.
les parisiennes retour de province.
ce que cherchent les parisiennes. — de quoi se compose une jolie femme a paris. — l’innocence à paris. — des vocations naturelles chez la parisienne.


Le courage des Parisiennes. — Les Parisiennes ont beaucoup plus de courage que les Parisiens : on avouera cela un jour. Regardez la rue, un jour d’orage : les hommes passent en cabriolet, les femmes s’en vont à pied dans l’eau et dans la boue. Sur dix passants, il y a huit femmes. Ce ne sont point des élégantes, non, sans doute ; mais ce sont de braves mères de famille laborieuses, qui courent pour affaires, des ouvrières consciencieuses qui reportent leur ouvrage à l’heure dite, des gardes-malades qui rejoignent un lit de douleur, de jeunes filles artistes qui regagnent leur atelier. Ceci est un indice infaillible ; vous ne risquez jamais de vous tromper en vous intéressant à la femme que vous voyez courir dans la rue par une averse. Le motif qui la fait sortir par ce temps-là méritera toujours votre intérêt et quelquefois votre admiration.

Les jeunes gens du jour ne savent plus ni souffrir, ni travailler ; ils ne savent rien supporter, ni la douleur, ni la pauvreté, ni l’ennui, ni les humiliations honorables, ni le chaud, ni le froid, ni la fatigue, ni les privations ; excepté quelques injures, ils ne savent rien endurer.

Voilà pourquoi les femmes ont été forcées de se métamorphoser ; elles ont acquis des vertus surnaturelles, et qui certes ne leur convenaient point. Elles sont devenues courageuses, elles dont les frayeurs puériles avaient tant de grâce, elles sont devenues raisonnables, elles dont la légèreté avait tant d’attraits ; elles ont renoncé à la beauté par économie, à la vanité par dévouement ; elles ont compris, avec ce pur instinct qui

  1. L’Esprit de madame de Girardin, avec une préfaçe de M. de Lamartine. 1 très-joli volume in-18, chez J. Helzel. 18, rue Jacob.