Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 2.djvu/145

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mille facéties du chapitre suivant, dont le titre doit faire sourire les amants aussi bien que les époux. S’il y a des rayons jaunes, pourquoi n’y aurait-il pas des joies de cette couleur excessivement conjugale ?

III
des risettes jaunes.

Arrivé dans ces eaux, vous jouissez alors de ces petites scènes qui, dans le grand opéra du mariage, représentent les intermèdes, et dont voici le type.

Vous êtes un soir seuls, après dîner, et vous vous êtes déjà tant de fois trouvés seuls, que vous éprouvez le besoin de vous dire de petits mots piquants, comme ceci, donné pour exemple :

« Prends garde à toi, Caroline, dit Adolphe, qui a sur le cœur tant d’efforts inutiles, il me semble que ton nez a l’impertinence de rougir à domicile tout aussi bien qu’au restaurant.

— Tu n’es pas dans tes jours d’amabilité !… »

Règle générale : Aucun homme n’a pu découvrir le moyen de donner un conseil d’ami à aucune femme, pas même à la sienne.

« Que veux-tu, ma chère, peut-être es-tu trop serrée dans ton corset, et l’on se donne ainsi des maladies… »

Aussitôt qu’un homme a dit cette phrase n’importe à quelle femme, cette femme (elle sait que les buscs sont souples) saisit son busc par le bout qui regarde en contre-bas et le soulève, en disant comme Caroline :

« Vois, jamais je ne me serre.

— Ce sera donc l’estomac…

— Qu’est-ce que l’estomac a de commun avec le nez ?

— L’estomac est un centre qui communique avec tous nos organes.

— Le nez est donc un organe ?

— Oui.

— Ton organe te sert bien mal en ce moment… (Elle lève les yeux et hausse les épaules.) Voyons, que t’ai-je fait, Adolphe ?

— Mais rien, je plaisante, et j’ai le malheur de ne pas te plaire, répond Adolphe en souriant.

— Mon malheur à moi, c’est d’être, ta femme. Oh ! que ne suis-je celle d’un autre !