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monsieur a., contrarié. — C’est fait à un point de vue purement politique, et par cela même sérieux ; mais le sujet comportait…

madame. — Sans aucun doute, il le comportait ; mais, non, c’est charmant. Impossible de mettre plus de sel… (elle sourit.) dans du sucre. (à part.) Il faudra pourtant que je coupe les feuilles de sa petite machine. — Dis donc, Ernestine, qu’est-ce que vous disiez donc à propos de cette pièce, est-ce joli ?

madame b. — Je ne l’ai pas vue, mon mari m’a dit : Eh, eh ! sans doute c’est fort amusant, mais c’est mal charpenté.

madame. — Mais il dit donc toujours la même chose ? Mal charpenté ! Il voit des poutres partout.

madame b. — Excepté dans son œil.

le domestique, annonçant. — M. le docteur P. (le docteur P. est très-chauve, cravate blanche, parle vite, coquet de ses pieds et de ses mains comme tous les accoucheurs ; on se salue.)

le docteur p., à madame. — Je viens de rencontrer votre mari qui m’a dit que vous étiez souffrante, je monte en passant. Où est-elle cette souffrance ?

madame. — Je vous dirai cela plus tard, cher docteur.

le docteur p. — Du tout, je n’ai que cinq minutes, je sors de l’Académie et l’on m’attend pour une consultation. À la tête, aux pieds, votre maladie ? Vous avez peut-être faim vers les six heures du soir ? Moi aussi cela m’arrive, (Il ôte son gant.) Voyons le pouls. Vous avez là un joli bracelet ; c’est indien cela ? c’est gentil.

madame, avec une petite moue. — Mais je souffre, je vous jure, j’ai des étouffements et pas d’appétit. Oh, ça m’inquiète !

le docteur p. — Et puis des bâillements le soir après dîner, quand vous n’allez ni au bal, ni au spectacle, ni au concert, et que votre mari vous lit le journal, n’est-ce pas ?

madame. — Oui, c’est positif.

le docteur p. — Eh bien, il faut prendre du sirop de gomme bien chaud et aller dans le monde.

le domestique, annonçant. — Madame D…

le docteur p., à madame D. — N’est-ce pas, chère madame, qu’il faut aller dans le monde quand on a des pesanteurs d’estomac ?

madame d., parlant très-haut. — Tiens, vous voilà, vous. Certainement qu’il faut aller dans le monde, mais pas dans la foule, entendons-nous. J’en sors de la foule ! Bonjour, mignonne chérie ; et toi, ma jolie. Je suis