Page:Gauvreau - Captive et bourreau, paru dans La Gazette des Campagnes, 1883.pdf/97

Cette page a été validée par deux contributeurs.

geance ; oui, une vengeance d’enfer, moi qui ai l’enfer dans le cœur ; oui, une vengeance qui lui saigne l’âme.

Mélas ne put en dire davantage ; suffoqué, il tomba sur le grabat infecte et hideux. Là, la tête dans les mains, il se mit à rêver. De rauques sanglots soulevaient sa vaste poitrine.

Pendant ce temps, la vieille sauvagesse prenait un jeu de cartes tout graisseux, et se prit à faire des signes cabalistiques.

Écoute, l’homme, lui dit-elle.

Mélas releva son front pâle, et la sauvagesse continua :

Le ramier revient au lit où l’attend sa compagne fidèle qui n’a pas voulu partager le nid de l’aigle qui la convoitait. Le voilà qui fend la mer immense, touche la terre ferme et rentre au colombier. Quelle joie ! quels roucoulements ! quelles becquées ! Et l’aigle, lui, se couvre de ses ailes, pour ne pas voir ce bonheur. Il a la force, lui qui plane dans les airs, mais il ne voit quel charme protecteur les couvre, ces jolis tourtereaux qui s’aiment. Mais je vois un éclair dans son œil ; ses larges serres se détendent subitement et…

Créature vénale et maudite, s’écrie Mélas exaspéré, tourneras-tu longtemps le fer dans la blessure que m’a faite son indifférence, par ton langage métaphorique ?