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nir sur le passé que jalonnent certaines époques heureuses. Quels seraient les tourments de l’exil, sans ce pouvoir de revenir par la pensée retremper ses forces au foyer paternel ?

Un mois après son départ, George débarquait en Angleterre. Après huit jours de séjournement à Liverpool, le vaisseau prit la haute mer et fit voile pour les Indes. Alors commençaient les périls de toutes sortes. Aux craintes des tempêtes vinrent s’ajouter celles de tomber, aux mains des Français, dont les nombreuses escadres sillonnaient l’Atlantique. Il fallait user de ruse pour aller jusqu’aux Indes et s’échapper aux griffes des Français. Heureusement, après une chasse de deux jours et une nuit par galion français, après avoir vu emporter son mat de perroquet par un boulet, le Vigilant put échapper comme par miracle à la faveur d’une grande brise. Plus tard il entrait dans le port de Bombay, après avoir vu un de ses matelots mourir dans la traversée.

Notre George, comme il est loin déjà de son pays. Ce ciel où l’on respire le feu n’est pas le sien. Oh ! comme son cœur se serra, au souvenir de la patrie absente. Le repos le trouva d’autant sans énergie que durant la traversée il lui avait fallu une attention de chaque jour et un surcroît d’ouvrage contre un ennemi qui pouvait fondre sur eux à l’improviste.

Laissons George accomplir son temps. Passons sous silence sa capture à bord d’un autre navire se rendant en Angleterre ; son séjour en France et sa remise en liberté comme Canadien-Français, et son engagement dans la marine française. Revenons au Canada, auprès de nos personnages laissés en arrière : la famille Vincent et la famille Boildieu.