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trouva calme. Il se décida même à accompagner George jusque chez lui.


IX

UN DÉPART.


— Dis donc, Pierre St Luc, on dit que George Dubois quitte le village ?

— Pas possible ! un si beau petit gars. Dis-moi donc c’t’envie qu’il a.

— C’est comme ça la jeunesse, mon cher, ça vous apprend un peu de latin, on bourre ça de grec, puis ça prend la clef des champs, et voilà.

— Mais quoi qui veut faire ?

— On dit qu’il va dans l’Europe, l’autre bord de la mer. Il veut faire un Capitaine.

— Tiens ! c’est peut être une bonne idée, José ! Qui sait si ce n’est pas sa vocation. C’est un gentil petit garçon ; bonne conduite, actif ; il fera son chemin.

— Oui, pour arriver jusqu’à avoir le magot du Notaire avec sa Demoiselle.

— Tiens !

— Toujours la même maladie, José. Tu ne peux pas voir un jeune homme fréquenter une fille à l’aise, toute suite : « Ah ! c’est pour le magot. » Sais-tu que ça peut faire bien du mal. Rappelle-toi ces mots, José :


Les abeilles piquent fort
Et les méchantes langues plus encore.


Ainsi parlaient deux habitants du village. Pierre St-Luc était à l’aise et à cette heure il travaillait dans sa batterie ; tandis que José Carrot, vieux garçon enragé voyait ses terres en ruine comme son taudis. Il allait répondre vertement à Pierre St-Luc