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C’est l’hospitalité canadienne, M. Boildieu, que vous pratiquez, lui dit Mélas.

Sur ce, on porta la main au chapeau et l’on s’éloigna. La grande place de l’église devint bientôt vide de toutes grandes personnes. Seuls les enfants y folâtraient dans l’herbe soyeuse et verte.

Il est huit heures du soir, et M. le curé vient de partir de chez M. le Notaire Boildieu. Il aurait voulu rester plus longtemps, passer la veillée, mais cela lui était impossible.

Mélas est le premier rendu ; sa bonne mère l’accompagne à ce rendez-vous de famille, où l’on est certain d’y voir régner cette joie intime, ce sans-gêne familier qui nous fait dire : Chez nous ! chez nous ! Il est tout frais, ce cher Mélas. Bien mis ; sa charpente massive disparaît sous le charme intérieur dont il s’était plu à s’entourer. Rien de recherché, rien de surchargé ; tout était naturel : c’était un bon point en sa faveur. On le remarqua, et il le sut.

Restait George. Il ne tarda pas à apparaître au fond de l’allée qui mène, à travers deux rangées d’arbres, à la porte d’entrée de la maison du Notaire.

— Vous êtes en retard, George, lui dit Mme  Boildieu.

— Moi ?

— Oui ; il est huit heures et demie !

— Oh ! alors, pardonnez-moi.

— Vous êtes tout pardonné. C’était le plaisir de vous voir qui m’a porté à vous parler ainsi. D’ailleurs, vous voir avec votre ami, au milieu de nous, efface tout cela.

— Si j’avais écouté ce sentiment, Madame, celui qui nous rend heureux de nous voir au milieu de