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nouvelles additions souvent réitérées de fumée de tabac sortant de leurs pipes toutes neuves pour la circonstance. On n’y parle que de choses graves ; ils laissent aux jeunes gens le soin de montrer leur adresse dans l’art de danser ; ils ont eu leur temps, eux aussi ; maintenant que la vieillesse est arrivée avec ses fils blancs et ses membres alourdis et rebelles, souvent ils aiment à causer sagement en fumant leurs pipes ; les vieillards aiment tant à parler.

À droite, c’est la salle de danse ; aussi un flot de dentelles et de rubans, moins cependant que de nos jours, s’agite dans un tourbillon échevelé. Les joueurs de violon suent affreusement, ceux qui dansent encore plus ; qu’importe, la passion, l’enivrement de la danse est là. On n’écoute que le bruit du pied frappant en cadence, et sur ce simple son on saute, tourne, avance et recule avec une dextérité incomparable, chacun dans son genre. Ceux qui attendent leur tour, restent debout, mais ne sont jamais seuls.

Que de scènes intimes, de petits drames familiers, se déroulent dans ces veillées où tout est en famille. Que de secrètes jalousies y prennent naissance ; que de haines souvent s’y enveniment ; mais en général il y a de la gaieté, de l’entrain, de la verve et du plaisir honnête. C’était encore le bon temps alors ; aujourd’hui que les temps sont changés et les mœurs aussi ! Ainsi, il y a plus de gaieté folle et écervelée, plus d’esprit par la quantité qu’on en prend, et alors le résultat final : une bassesse en règle. Heureusement que cela est rare.