Page:Gauvreau - Captive et bourreau, paru dans La Gazette des Campagnes, 1883.pdf/176

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de la mer et le chant des oiseaux. Mais il se fait tard, il me faut partir. Demain, au soleil couchant, je serai ici ; fidèle au rendez-vous, je t’attendrai. Adieu ! Ton nom ?

— Laurent.

— Adieu, Laurent ; que le sommeil ne te soit pas lourd.

— Au revoir, Fleur-du-mystère ! que mon nom te berce, ce soir, sous ton wigwam, le nom de celui qui t’aime déjà.

— D’amour ?

— Oui, d’amour.

— Eh bien, moi aussi je t’aime d’amour, et plus que mon père qui me gronde sans que je me plaigne. Maintenant que je t’aime, je serai heureuse de souffrir, car je ne serai plus seule.

Le cœur de Laurent bondissait de joie. Exilé, il avait cru mourir de nostalgie, mais à cette heure qu’il voyait une enfant de seize ans lui sourire et l’aimer avec cette candeur et cette simplicité si naturelle chez elle, il ne demandait plus que de vivre dans ce petit coin de terre entre Fleur-du-mystère et son devoir.

Tous deux se comprenaient déjà, et ils surent mettre dans leur amour cette force que donne le malheur, quand on rencontre sur sa route une âme qui s’attache à soi.

Le lendemain du jour de leur première entrevue, ils furent fidèles au rendez vous ; nouveaux charmes, nouvelles expressions. Ils parlèrent de Dieu, de ses œuvres ; et tout en s’aimant, Fleur-du-mystère trouvait moyen de s’instruire.

Que c’était touchant et sublime de voir ces deux jeunes enfants, assis au bord de notre beau fleuve,