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— Oh ! madame, j’aurai aimé mieux trouver ici un cercueil, qu’une pauvre âme sans vie intellectuelle, un pauvre corps sans cœur capable de comprendre.

— Ne parlez pas ainsi, George. Alexandrine a des moments de lucidité qui nous font espérer qu’un jour elle reviendra à la vie de l’intelligence et du cœur. Elle comprendra parfois votre douleur ; elle vous reconnaîtra pour son George, et ce sera un rayon de soleil sur votre âme éplorée. Le grand remède, c’est le temps. Voyons ! George, il y a de la religion dans votre cœur ; sachez prendre comme il le faut l’épreuve que le ciel vous envoie. Vous avez l’aisance désormais, eh ! bien, malgré la blessure mortelle qui brise votre âme, malgré les ruines au milieu desquelles vous allez vivre, dévouez-vous pour cette âme vôtre qui n’a plus conscience de son être, ni de la vie ; veillez sur elle avec sollicitude ; aimez-la. Elle est comme un enfant et ne demande qu’à parler de son Armande, quand l’heure des ténèbres sonne pour elle. Et elle se prit alors à lui raconter tous les détails de cet épouvantable événement.

George pleurait à chaudes larmes. Le lion de la mer, si fort en face des périls de l’Océan, devenait agneau en présence de la douleur ressentie vivement. Il remercia sa belle mère, bien résolu à se dévouer pour ramener Alexandrine à la raison. Tout serait employé dans ce but. Confiant en Dieu, il allait l’entourer de soins, veiller sur elle, l’aimer