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femmes de Thèbes, moins courageuses que les femmes de Paris, poussent des cris de terreur, se frappent le sein, s’arrachent les cheveux, se précipitent aux pieds des autels, tendant vers le ciel leurs mains suppliantes et se livrant à ces excès de douleurs antiques dans lesquels Eschyle sait si bien résumer la désolation de toute une ville, de tout un peuple. Avec cet immense chœur s’exhale le désespoir de Thèbes aux abois, qui, après un long siège, va subir l’assaut suprême.

Ce tumulte impatiente Étéocle. Il craint que ces gémissements, ces prières et ces larmes n’énervent le courage des soldats, et il impose assez durement silence aux Thébaines : « N’allez pas, si l’on vous dit qu’il y a des morts, des blessés, n’allez pas vous mettre à pousser des lamentations : le carnage, c’est la pâture du dieu Mars ! »

Pendant que nous lisions dans le vieil Eschyle les Sept contre Thèbes, parfois il nous semblait entendre à travers le silence de la nuit le coup sourd d’un canon éloigné. Les moyens de destruction se sont bien perfectionnés depuis Étéocle et Polynice, où l’on assaillait les murailles à coups de pierre.