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Au bout d’une heure, Toby monta dire que mademoiselle Amine était en bas, dans la voiture, qui attendait.

Amine avait une toilette d’une légèreté féerique, un brouillard de tarlatane enveloppait son corps svelte et souple. Une couronne de volubilis aux feuilles diamantées, aux calices d’un rose idéal, ceignait ses tempes transparentes ; elle était adorable, et Dalberg lui-même ne comprit plus qu’il eût tenu rigueur à tant de grâces. Les femmes, quand il s’agit d’en désespérer une autre, trouvent des beautés inconnues, et qui ne servent que pour ces jours-là.

À peine Dalberg s’était-il assis derrière Amine dans la baignoire qu’elle occupait à l’année, que la porte d’une loge de première galerie, située en face, s’ouvrit avec fracas. — Dalberg vit entrer deux hommes et une jeune fille vêtue de blanc, avec un gros bouquet de violettes au corsage et des fleurs pareilles dans les cheveux. Le plus âgé des hommes était M. Desprez, l’autre Rudolph, et la jeune fille, Calixte.




VII


C’était bien elle ! Sa robe, un peu moins montante qu’à l’ordinaire, laissait voir un commencement d’épaules d’une blancheur éblouissante. Sans cesser d’être virginale, sa toilette avait fait aux exigences du monde les sacrifices indispensables. Ainsi dégagées des voiles dont les surchargeait une pudeur peut-être trop susceptible, les formes gracieuses de son buste ressortaient dans toute leur harmonie. Sa tête jouait