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bon à être sifflé au Louvre par les pages ; le Virgile un regrattier, le Nason un mince écolier en matière d’amour, Orphéus un mauvais joueur de cornemuse. — Nos prospectus sont loin encore d’être à cette hauteur : malgré tous les perfectionnements successifs de cette branche d’industrie, nous n’osons pas donner aussi hardiment de l’encensoir au travers du visage à nos amis et connaissances. — Cela viendra ; il ne faut désespérer de rien dans le meilleur des mondes possibles.

Nous avons rarement vu d’aussi réjouissantes illustrations que celles du livre de Virbluneau. Cependant les vignettes des romans modernes ne laissent guère à désirer sur ce point ; — c’est d’un mauvais goût très-curieux et très-amusant. L’esprit de l’époque y est travesti d’une façon cruellement fidèle : ici, sur un autel chargé d’emblèmes érotiques et de chiffres entrelacés, deux mains se serrent au milieu d’une grande flamme ; dans le cartel est écrit : Alit concordia flammam : cela n’est-il pas très-charmant et très-ingénieux ? — Plus loin, c’est une pyramide dont la base plonge dans un brasier ardent ; sur la pointe est fiché un cœur avec des effluves rayonnants ; un lierre embrasse étroitement de ses deux bras noueux les pans du monolithe ; en haut l’on voit cette inscription : Eo spe me ducente, amore consumor ; en bas, entre des S et des carquois : Celsior ignis adurat. Le cœur empalé signifie amour platonique ; le feu qui brûle au pied de la pyramide, représente l’amour charnel ; le lierre, ainsi que le sait la plus petite couturière, est le symbole de la fidélité ; la pyramide veut dire solidité et force. Voilà qui est très-bien. Si j’étais femme, je ne ré-