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Typhon s’y retournerait les ongles. Le temps se passe en délibérations ridicules, et Jupiter lève la séance. Chacun retourne dans sa chacunière sans que les choses soient plus avancées.

Au commencement du troisième chant, Apollon fait monter là-haut les nuages demandés : ce sont des nuages première qualité, gros de nitre, de soufre et de résine ; l’air en est obscurci : jamais brouillard de Londres ne fut d’une telle épaisseur. À la faveur de ces nuages qui empêchent de voir la terre du ciel, Encelade commence à poser des montagnes les unes sur les autres, comme un maçon qui arrange des briques ; il met Pélion sur Ossa, et fait un si prodigieux entassement, qu’il atteint à la hauteur du logis des Olympiens, dont il rejoint les murailles à l’aide d’un pont volant. Jupiter, voulant voir le temps qu’il fait, ouvre une fenêtre, et n’est pas médiocrement effrayé en se trouvant face à face avec le monstrueux visage du géant. Heureusement la fenêtre est trop étroite pour qu’il y puisse passer. Jupiter crie : À moi ! à moi ! demande sa boîte à poudre, retrousse sa manche jusqu’au coude et s’apprête à darder un coup dans la tête du géant, qui, voyant le péril, enfonce par la croisée un immense tronc de cèdre. — Il ne s’en faut pas de trois doigts que Jupiter ne soit embroché et piqué contre le mur comme une chouette à la porte d’un garde-chasse. L’alarme est donnée ; les dieux jettent par-dessus les créneaux des remparts célestes des fagots, des plâtras, des escabeaux, des eaux de toutes sortes, excepté des eaux de senteur, des poêles pleines de beurre bouillant ; Encelade en reçoit une sur le museau, qui, bien que