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sceau de cire jaulne avec une L, car elle y est et sur simple queue ! quoi de plus respectable et de plus capable d’imposer silence aux malignités de la critique ! Les prospectus de maintenant sont de pauvres choses à côté de cela, même quand ils sont rédigés par ce bon Charles Nodier, l’homme d’aujourd’hui qui loue avec la bonhomie, et la candeur la plus effrontée. Je mets cette louange dans le privilège bien au-dessus des sonnets espagnols ou italiens, latins et grecs, des madrigaux en hébreu ou en syriaque, dont la scientifique théorie se déroulait pompeusement sur les premières pages de tout ouvrage nouveau, et je suis fâché, en vérité, qu’on ne mette plus de privilèges aux livres, car je me serais servi immanquablement de ce subterfuge laudatif dans mon prochain poème épique.

La fable du poème est fort simple. Un ange suggère à Alaric le dessein de renverser Rome, dont les crimes ont enfin lassé la patience du Tout-Puissant. Alaric accepte avec joie cette haute mission ; mais la belle Amalazonthe, qui est l’objet de sa flamme, ne peut souffrir qu’il parte, et fait tous ses efforts pour le retenir ; elle n’y réussit pas, et appelle au secours de ses charmes les charmes d’un nécroman nommé Rigilde. Celui-ci remplit de fantômes la forêt où l’on coupe les arbres pour faire des vaisseaux, et met le diable au corps d’un ours blanc qui mange les travailleurs. Le tuer n’est qu’un jeu pour Alaric, qui est fort vaillant et très-adroit. La flotte part enfin, le magicien Rigilde endort les matelots et emporte Alaric, aussi endormi, dans une île enchantée où il lui fait voir une fausse Amalazonthe. Le prélat d’Upsal rompt à grand’-