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les cruautés de l’amour

lui retrousse la lèvre. Bon ! elle a le même parfum dans les cheveux, mais elle en a trop mis ; suave et délicat dans les boucles de Juliette, il me semble maintenant violent et grossier.

— J’ai eu l’honneur de rencontrer mademoiselle votre sœur en omnibus, dit-il, pour dire quelque chose.

— Oui, monsieur, elle me l’a raconté, c’était son jour d’aller au marché.

— Les mêmes paroles ! pensa Maurice. Pourtant Juliette a énormément d’esprit.

— C’est mon jour le mardi, reprit Julie ; si c’eût été un mardi, c’est moi que vous eussiez rencontrée.

Maurice voulut faire un compliment, mais il dit des choses pitoyables. Heureusement la musique cessa, et il n’eut pas besoin d’achever sa phrase. Cependant la soirée touchait à sa fin. Lorsque Mme  et Mlles  Manivaux se retirèrent, Maurice les aida à retrouver leurs manteaux et sortit avec elles.

— Vous n’avez pas peur d’être assassinées, trois femmes seules ? dit-il, permettez-moi de vous escorter jusqu’à votre porte, car s’il vous arrivait malheur je garderais un remords éternel.

— Il n’y a aucun danger, monsieur, mais puisque vous êtes assez aimable pour nous offrir votre