Page:Gautier - Les Cruautés de l'Amour, E. Dentu, 1879.djvu/291

Cette page a été validée par deux contributeurs.
279
les cruautés de l’amour

— J’avais bien deviné que vous étiez cruelle, dit Maurice, à voir la charmante moue de vos lèvres. Alors vous ne voulez plus me laisser vous regarder de loin ?

— Oh ! monsieur, dit Juliette en riant, j’ai été patiente toute une semaine, mais Julie commençait à vous remarquer…

— Julie ?

— Ma sœur.

— Quelle idée déplorable de l’avoir appelée Julie ! marmotta intérieurement l’amoureux.

— Je lui ai dit, pour vous excuser, reprit Juliette, que vous deviez être un voisin, puisque je vous avais vu en omnibus et que vous étiez descendu en même temps que moi.

— Que vous êtes bonne de vous souvenir de notre première rencontre.

— C’était un jeudi, dit-elle, mon jour d’aller au marché.

La valse était finie. Maurice reconduisit Juliette à sa place. Il fut d’une amabilité extrême avec la mère et offrit son bras à Julie pour la prochaine danse.

— C’est étrange, se dit-il en dansant avec elle, lorsque je ne vois plus Juliette, il me semble que Julie lui ressemble absolument, et cependant celle-ci, à vrai dire, est plutôt laide avec sa grimace qui