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les cruautés de l’amour

mes fort de la bonne aubaine. Le bain pris, nous portâmes sur la falaise le plus de paillasses possible, et après avoir donné du maïs et une demi-bouteille de vin aux poules, nous déjeunâmes, non sans gloutonnerie ; puis nous reprîmes courageusement notre travail.

Le rasoir nous servit à déchirer la toile goudronnée, et bientôt milady attacha à une branche un ruban en guise de drapeau et un bouquet de menthe. Comme je n’avais pas d’échelle à construire et que nous avions acquis quelque expérience, ma maison, à moi, était construite avant le coucher du soleil, et, le soir, nous pûmes rentrer nous coucher chacun chez nous.

Le lendemain, je descendis de mon abri à l’aide d’une corde, et je me mis à la recherche d’une source ou d’un ruisseau, car les poules avaient des attitudes titubantes, qui ne laissaient pas de m’inquiéter. Mais j’eus beau rôder, les yeux fixés à terre, je ne découvris, à mon grand chagrin, aucune trace d’eau douce, milady prétendait qu’il y aurait de l’orage avant peu, car l’horizon se couvrait de vapeurs et la chaleur était suffocante ; mais nous n’avions aucun récipient pour recevoir l’eau. Nous fûmes obligés de creuser des trous, que nous pavions de galets et de feuilles, et de réunir tous les coquilla-