Page:Gautier - Les Cruautés de l'Amour, E. Dentu, 1879.djvu/222

Cette page a été validée par deux contributeurs.
210
les cruautés de l’amour

— J’en suis convaincue aussi.

— Mais, pendant le naufrage le vent du nord-est s’est mis à souffler.

— Le vent du nord-est ?

— Du nord-est et presque du nord-nord-est ; il souffle encore.

— C’est effrayant !

— Épouvantable ! de sorte que le navire a légèrement dévié de sa route. Il s’est mis à marcher vers le sud en inclinant un peu à l’ouest, et la chose était inévitable, puisque le vent nord-nord-est le poussait.

— Je comprends parfaitement, vous êtes très-savant, monsieur de Puyroche.

— Hélas ! madame. Une fois le naufrage accompli, lorsque la vapeur n’a plus lutté, le navire a marché plus décidément vers le sud-ouest, et il allait prodigieusement vite, madame, car le vent soufflait fort.

— En effet il m’a semblé que nous marchions très-vite.

— Si la vapeur file mille vingt nœuds à l’heure, nous en filions dix-huit cents environ.

— Vous croyez ?

— J’en suis sûr. Après avoir multiplié le nombre de nœuds par le nombre d’heures, après m’être