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les cruautés de l’amour

— Tu veux donc le tuer, Pavel ? criait-elle ; modère tes chevaux.

À d’autres moments, au contraire, elle trouvait qu’on n’avançait pas.

— Plus vite ! plus vite ! disait-elle alors. Son sang ruisselle de toutes parts. Encore quelques minutes et il ne lui en restera plus une goutte dans les veines.

On atteignit enfin Wologda, on franchit la porte du château. Encore quelques instants et un médecin serait près du blessé.

Tous les serviteurs et toutes les servantes s’empressaient autour du perron pour saluer la maîtresse. Prascovia, en grand deuil, s’avançait aussi d’un air dolent. Elle faillit tomber à la renverse en voyant la jeune fille inondée de sang, le visage bouleversé, les yeux pleins de larmes.

— Seigneur ! Seigneur ! quelle catastrophe ! s’écria-t-elle.

— Ouvrez les portes ! apportez des linges, de l’eau froide ! cria Clélia en pénétrant dans le vestibule.

Puis elle monta en courant le grand escalier.

— Dans quelle chambre faut-il porter le blessé ? demanda une femme de chambre ; dans celle du seigneur qui vient de mourir ?