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COUPS D’ÉPÉE, COUPS DE BÂTON, ETC.

nir en son château, il s’est engagé dans la troupe pour suivre ses amours. Ce n’est pas vous qui trouverez ce pourchas galant de mauvais goût, puisque la dame de ses pensées excite votre fantaisie.

— Non ; j’admets tout ceci. Mais vous conviendrez que je ne pouvais deviner ce roman, et que l’action du capitaine Fracasse fut impertinente.

— Impertinente venant d’un comédien, reprit M. de Bruyères, naturelle venant d’un gentilhomme jaloux de sa maîtresse. Aussi le capitaine Fracasse jette-t-il son masque et vient-il, comme baron de Sigognac, vous proposer le cartel par mon entremise et vous demander raison de l’insulte que vous lui avez faite.

— Mais qui me dit, fit Vallombreuse, que ce prétendu Sigognac, qui joue les Matamore dans une compagnie de bouffons, ne soit pas un intrigant de bas étage usurpant un nom honorable pour avoir l’honneur de faire toucher sa batte d’histrion par mon épée ?

— Duc, répliqua le marquis de Bruyères d’un ton plein de dignité, je ne servirais pas de témoin et de second à quelqu’un qui ne serait point né. Je connais personnellement le baron de Sigognac, dont le castel n’est qu’à quelques lieues de mes terres. Je me porte son garant. D’ailleurs, si vous doutez encore de sa qualité, j’ai là toutes les pièces qu’il faut pour rassurer vos scrupules. Voulez-vous me permettre d’appeler mon laquais, qui attend dans l’antichambre et vous remettra les parchemins ?