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dans tous le palais, c’est Iza-Farou qui possède les plus beaux poissons.

— Comment ! Fatkoura ! s’écria une voix de femme de l’intérieur d’un pavillon, tu es dehors à une pareille heure ? Est-ce donc parce que tu es veuve que tu prends si peu de soin de ton teint et que tu vas le laisser dévorer par le soleil ?

Un store se releva à demi et Iza-Farou avança au dehors sa jolie tête toute hérissée d’épingles blondes.

— Ah ! dit-elle, le seigneur de Nagato ! Vous ne passerez pas devant ma demeure sans me faire l’honneur d’y entrer, ajouta-t-elle.

— Nous entrerons avec plaisir, en remerciant le hasard qui nous a conduits de ce côté, dit Fatkoura.

Ils gravirent l’escalier du pavillon et s’avancèrent au milieu des fleurs qui emplissaient la galerie.

Iza-Farou vint au-devant d’eux.

— Qu’as-tu à me dire ? demanda-t-elle à demi voix à son amie, tout en saluant gracieusement le prince.

— J’ai besoin de toi, dit Fatkoura ; tu sais que je suis en disgrâce.

— Je le sais, est-ce ta grâce qu’il faut que j’implore ? mais puis-je assurer à la souveraine que tu ne retomberas plus dans la faute qui l’a si fort irritée ? dit Iza-Farou, en jetant un malicieux regard à Nagato.

— Je suis le seul coupable, dit le prince en souriant ; Fatkoura n’est pas responsable des actions d’un fou tel que moi.

— Prince ! je la crois fière d’être la cause de ce que tu appelles des folies, et bien des femmes la jalousent.

— Ne me raillez pas, dit Nagato je suis assez puni d’avoir attiré sur la noble Fatkoura le courroux de la souveraine.