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HISTOIRE D’UN POËME NATIONAL

d’étudiants, d’ouvriers, de soldats : et ces auditeurs (nous l’avons vu) pleuraient, frémissaient, admiraient, applaudissaient. C’est notre Épopée traduite en polonais[1] ; c’est la réimpression du petit livre danois consacré depuis le xve siècle à la gloire de Charlemagne et de Roland[2]. C’est M. Fr. Michel, donnant une nouvelle édition de notre vieille Chanson[3], publiant le texte de Paris encore inédit, et accompagnant ces deux textes d’une sorte de traduction populaire. C’est la « Bibliothèque bleue », encore en faveur dans nos campagnes ; c’est Galien le restauré, ce sont les Conquestes du grand Charlemagne errant encore sur les quais de Paris. C’est une autre traduction qui vient de paraître et dont M. Lehugeur est l’auteur : en vers, celle-là, et bien médiocre[4]. C’est M. G. Paris, prenant la Chanson de Roland pour sujet de ses leçons au Collége de France, pendant cette triste année 1870-1871, durant ce siége de Paris, où il est si bon de penser à notre vieille gloire nationale et aux poëtes qui l’ont chantée !

On peut dire, toutefois, que la période de vulgarisation avait fait place dès l’année 1863 à celle de la critique, et cette ère nouvelle avait été inaugurée par l’œuvre d’un Allemand, par la belle édition du Roland que nous devons à M. Th. Müller[5]. Je me sens d’autant plus à l’aise pour le louer, que je crois avoir fait équitablement la part de la France et de l’Allemagne dans

  1. Par Mme Duchinska. (M. Pruszak), Bibliothèque de Varsovie, janvier 1866.
  2. Keiser Karl Magnus’s Kronike, éd. Carl Elberling. Copenhague, 1867, in-18.
  3. La Chanson de Roland et le Roman de Roncevaux des XIIe et XIIIe siècles, etc. Paris, Firmin Didot., 1869, petit in-8o. ═ Dans sa Préface, M. F. Michel cherche surtout à accabler… M. Génin. ═ À la dernière page, il avoue fort naïvement n’avoir pas eu connaissance de l’édition de M. Th. Müller (p. 363).
  4. La Chanson de Roland, poëme français du Moyen âge, traduit en vers modernes, par Alfred Lehugeur. Paris, Hachette, 1870.
  5. La Chanson de Roland, nach der Oxforder Handschrift von neuem herausgegeben, erlaütert and mit einem vollständigen Glossar versehen, von Theodor Müller, professor an der Universität zu Göttingen ; erste Hälfte. Gœttingen, 1863. On attend l’Introduction.