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tite moue dédaigneuse, en êtes-vous aux expédients de Tartuffe, et avez-vous besoin, pour toucher mon bras, de parler de mon bracelet ?

― Ce sont des topazes d’une eau et d’une pureté admirables, continua George ; c’est B*** qui vous a monté cela : il n’y a que lui pour ces sortes d’ouvrages. Quel est l’Amadis, le prince Galaor, le charmant vainqueur qui vous a donné cela ? Il est donc bien jaloux qu’il vous tient enfermée et murée comme le sultan des Turcs son odalisque favorite ?

― C’est Fortunio, répondit Musidora.

― Ah ! fit George, Fortunio ! ― Quand faut-il que je t’envoie la calèche et l’attelage ? je ne m’étonne plus de ta disparition. Tu as bien employé ton temps. ― Tu avais demandé six semaines, et il ne t’a fallu que quinze jours pour pénétrer un mystère qui déjoue notre sagacité depuis trois ans. ― C’est beau ! ― Je te donne le cocher poudré à frimas et deux grooms par-dessus le marché. ― J’espère bien que tu nous vas conduire au vrai terrier de ce madré renard, qui nous a toujours donné le change, dans la calèche que tu m’as si adroitement gagnée.

― Je n’ai pas vu Fortunio depuis la nuit du souper, reprit Musidora en soupirant ; je ne sais pas plus que vous, George, où son caprice l’a poussé, j’ignore même s’il est en France. ― Ces pierreries proviennent du portefeuille que je lui ai dérobé, comme vous le savez ; elles en