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Ce sont sans doute des duchesses qui auront lu mon Traité sur la ponctuation du mantchou et qui seront devenues amoureuses de moi.

Il fourra, en tremblant de précipitation, ses maigres bras dans les vastes manches de la houppelande et se dirigea vers le salon.

En voyant Arabelle et Musidora, le vieux savant, ébloui, renfonça sa perruque jusque sur ses yeux, et leur fit trois saluts, qu’il s’efforça de rendre le plus gracieux possible.

« Monsieur, lui dit Musidora, il n’est bruit dans toute la France et dans toute l’Europe que de votre immense savoir.

― Mademoiselle, vous êtes bien bonne, dit le professeur, qui rougit de plaisir comme un coquelicot.

― L’on dit, continua l’Arabelle, qu’il n’y a personne au monde qui soit plus versé dans la connaissance des langues orientales et qui lise plus couramment ces mystérieux caractères hiéroglyphiques dont la connaissance est réservée aux sagacités les plus érudites.

― Sans me flatter, je sais du chinois autant qu’homme de France. Madame a-t-elle lu mon traité sur la ponctuation mantchoue ?

― Non, répondit Arabelle.

― Et vous, mademoiselle ? fit le savant en se tournant vers Musidora.

― Je l’ai parcouru, dit-elle en comprimant avec peine un éclat de rire. C’est un ouvrage